Si sous croyiez que les pélargoniums n’avaient qu’un seul roi avec le roi des balcons, vous avez tout faux !
Chez moi, j’en héberge un autre, le roi des pénibles, j’vous dis pas, c’est un enquiquineur de première.
Pelargonium caroli-henrici qu’il s’appelle. Personne ne le connaît ? Normal ! C’est une rareté. Une rareté qui nécessite une bonne dose de bienveillance pour le supporter. Honnêtement, y a pas que lui qui est compliqué à vivre chez les pélargoniums, mais celui-là .... quel boulet !
Comme il ne me casse pas trop les pieds actuellement, .... c’est peut-être le bon moment pour dresser son portrait ... vite fait.
Vite fait ! .... C’est quand même une histoire qui date un peu. Avec 6 graines issues de 2 sources différentes et semées début 2010, je n’ai obtenu qu’une seule germination au début du mois de mai de la même année. Et puis, tout doucement, au fil des saisons, le tubercule a pris de l’embonpoint. Je ne connais pas sa courbe de croissance type, mais je dois avouer que plus d’une fois, j’ai été tenté de le doper avec des boissons énergisantes. Je ne suis pas particulièrement fan des grosses potées, mais là ....
En novembre 2011, je l’avais déjà présenté sur le forum dans un post intitulé, « Les pélargoniums se réveillent ».
Novembre ! Avec une reprise de végétation aussi précoce, j’étais persuadé qu’il fleurirait au printemps suivant, .... que nenni. Dire que chez lui, en Afrique du Sud, il fleurit déjà en octobre. Le mien devait être trop jeune ....
Et puis, il y a eu l’automne 2012, pas très chaud, suivi d’un hiver particulièrement froid et long. C’est clair que ma gestion de la température à l’intérieur de ma serre ne lui a pas plu puisqu’il n’est sorti de sa dormance qu’en février 2013, visiblement à contre cœur et sous mes arrosages répétés. Et quand j’écris arrosages répétés
.... Bref ! Une petite touffe de feuilles et puis bye-bye, il est retourné roupiller pour au moins 6 mois.
Je ne rappelle plus ce qu’il s’est passé avec lui en 2014. Rien de particulier sans doute, je me demande même si je ne l’avais pas mis sous une étagère cette année-là.
Et en 2015, bingo ! Il a fleurit. Il était temps ! C’est qu’il avait 5 ans le pépère. Comme beaucoup d’autres
Pelargonium de la section
Hoarea à laquelle il appartient, sa floraison a débuté lorsque le feuillage a commencé à faner.
Le voici le 6 avril 2015.
Ce pélargo est un caractériel, il voudrait être tout seul dans la serre et profiter d’un max de lumière .... Et puis quoi encore ? En conséquence, il m’a fait le coup des pétioles allongés. Bon ! Faut dire aussi qu’il a des prédispositions. Dans la nature, (et en plein soleil) ses pétioles peuvent atteindre 5 ou 6 cm de longueur avec un diamètre d’un ou deux mm.
Quelques jours plus tard ....
Tel qu’on le voit là, il a sa taille normale, de 11 à 25 cm de hauteur en fleurs.
Pour le cultiver, il faut savoir que le calcaire, c’est pas son truc. Il préfère les sols siliceux car c’est dans des plaines recouvertes de cailloux de quartzite qu’il pousse en compagnie de succulentes, dans une vaste région au centre ouest de la Province du Cap. Un endroit aride où le cumul des pluies varie entre 50 et 150 mm dans l’année, et ce, uniquement en hiver. Cet endroit est le Knersvlakte. Un endroit surgit de nulle part. Le voici vu du ciel.
Lunaire, n’est-ce pas ? La route qui traverse cet endroit est la nationale 7, pas celle qui conduit vers les rivages du Midi, non. C’est celle qui relie Le Cap au Namaqualand. Et les étendues blanchâtres sont des déserts de quartz blanc ....
(Captures d’écran avec Google Earth)
Lorsque l’on traverse ces grandes étendues, beaucoup de personnes pensent qu’il n’y a rien à voir, mis à part l’horizon et cette route qui n’en finit pas. Et pourtant. Avec des conditions de vie extrêmes, on est dans une partie du monde qui abrite le tiers des espèces succulentes présentes sur la planète, et donc, avec un niveau d’endémisme hyper élevé. Des plantes rase-mottes, petites, parfois à peine visibles comme les
Lithops, beaucoup d’
Aizoaceae et de
Crassulaceae, toutes avec un instinct de survie hors du commun. On appelle ces zones Succulent Karoo.
Ces zones de quartz blanc ont la particularité de ne pas trop absorber la chaleur car elles reflètent la lumière du soleil. Cela crée un environnement intensément lumineux et les plantes qui s’y trouvent ont un comportement souvent similaire à nos plantes alpines. A l’identique, les dérèglements climatiques sont sans doute leur pire ennemi. C’est qu’elles n’ont pas d’échappatoires. Elles ne peuvent pas migrer vers d’autres lieux qui sont généralement plus hostiles. Ne serait-ce que par la présence de roches plus sombres qui emmagasinent la chaleur. Il ne faut donc pas s’étonner si beaucoup d’espèces sont directement menacées d’extinction. Un note positive cependant, on est très loin de connaitre toutes les plantes qui poussent dans ce « coin ». D’ailleurs,
Pelargonium caroli-henrici n’a été identifié qu’en 1987.
Pour cette année, je ne me rappelle plus à quelle date mon
Pelargonium caroli-henrici est sorti de sa dormance. Mais le voici le 27 février dernier.
J’espérais secrètement que pour sa deuxième année de floraison, il me ferait au moins 3 hampes florales. Et bien je les eues ! C’était le 22 avril 2016 ....
Vous avez vu le sale coup qu’il m’a fait ?
Il s’est sabordé ! Il s’est mutilé ! Il a jugé qu’une seule pseudo-ombelle de fleurs suffirait cette année .... et il a profité que j’avais le dos tourné pour faire son coup en douce.
Vert de rage, j’étais.
Arf ! Faut dire aussi que cette fin d’avril était bien chargée. Préparation de la foire aux plantules, contrôle des semis, les iris en fleurs, les saxifrages et les primevères chez le photographe .... peut-être que je l’ai négligé un peu, .... question arrosage.
Pourtant c’était à cette même époque qu’ont fleurit, dans cette même serre et avec les mêmes soins, d’autres pélargoniums comme
Pelargonium sp.
Hoarea LAV26962 présenté précédemment ou bien encore ce
Pelargonium ochroleucum.
Bref ! On l’aura bien compris, ce pelargo, question tolérance, c’est zéro ! Du coup, je ne l’ai plus photographié et je suis passé à autre chose.
A la veille de son septième anniversaire, et dans ma grande mansuétude, j’ai décidé d’améliorer son quotidien. D’abord, je l’ai placé pile-poil au-dessus d’un câble chauffant dans une tablette de culture. Je me suis dit que s’il avait le feu aux ....
au derrière, il serait un peu plus pressé de fleurir qu’à l’ordinaire.
Du coup, il est sorti de sa dormance au début du mois de novembre. Maintenant, .... je flippe un peu. C’est qu’avec lui, je m’attends au pire. Surtout que ....
j’ai oublié de le rempoter cet été.
Le voici aujourd’hui. Tranquille !